Bo-Doï

Le livre dont il est le héros

Quand « Les films du Blaireau  » viennent s’installer dans le bar àRiri pour y tourner le nouveau film de Phil Coyote, Alfred, ex livreur de pizzas au chômage, se voit déjàen haut de l’affiche. Une cuite et un esclandre plus tard, Alfred est soupçonné par la police d’être responsable du meurtre du jeune premier retrouvé mort dans son appartement. Alfred se réfugie dans un suqt et se lance dans sa propre enquête pour prouver son innocence…

Après un excellent premier album, Des méduses plein la tête, Pourquié et pécherot récidivent avec ce polar jouissif qui emmène le lecteur dans un Paris parallèle, celui des sans papiers, des squats et de la faune mandarine (vous comprendrez en le lisant). Alfred, l’anti-héros, vot sa vie comme il lit ces « livres dont vous êtes le héros  » (il se donne toujours le choix entre trois routes àsuivre) et se démène comme il peut avec une réalité qu’il s’évertue pourtant àfuir. Le trait de Pourquié (un savant mélange de ceux de Blutch, Chauzy et Baron Brumaire) donne du relief àl’histoire de Pécherot, celui-ci confirme son talent d’écrivain de polar (déjàtrois romans dans la Série Noire). Ces deux-là, àl’instar de leur héros, va falloir les surveiller de près.

© NP Bo-Doï



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Pascal Ory

Nous sommes dans le monde d’Amélie Poulain, son vieux Paris qui disparaît, ses rades un peu crades, ses vieilles mémés un peu déjantées, le héros est un livreur de pizzas, son copain Moussa, balayeur. A ceci près que le livreur est au chômage, le balayeur sans papier, que le pizzaïolo gamberge un peu trop, surtout quand il est sous l’effet de liqueurs et de drogues variées, parmi lesquelles figure le redoutable mélange du kiravi et du champagne.

Le plus intéressant n’est pourtant pas dans l’intrigue policière, peu vraisemblable, àla Léo Malet - « autant chercher une anguille dans une boîte de coings  » - mais, comme d’habitude, dans la manière dont elle est racontée : du point de vue du livreur, plus imbibé de science-fiction série B que d’alcool frelaté, ce qui le conduit àregretter, fugitivement, quand il n’est pas dans un mauvais pas, de ne pas pouvoir « revenir un chapitre en arrière  ». Cette liberté de ton permet aux auteurs de parsemenr leur petite histoire de clins d’Å“il pour initiés (un acteur de cinéma s’appelle Kouletchov, on aperçoit Belmondo et Jean Seberg tout droit sortis d’A bout de souffle) mais surtout, de se payer le grand luxe de proposer au personnage principal trois fins possibles, conformément au principe du « livre dont vous êtes le héros  ». La troisième, la plus vraisemblable est astucieusement la moins réaliste, le livreur au chômage n’ayant plus d’autre solution que de sombrer dans le fantasme extra-terrestre. Comme quoi il ne faut pas se fier au dessin dont l’expressionisme en apparence vite torché pouvait tirer vers la caricature, alors qu’il s’agit d’abord de coller au tableau d’un univers dur aux vaincus de la vie.

© Pascal Ory, Lire

l’Humanité

Olivier Ka

Ex-livreur de pizzas au chômage, Arthur Clams partage son temps entre le bistrot et ses lectures : des livres dont vous êtes le héros. L’esprit batifolant dans la cinquième dimension, il va se lancer dans une enquête tarabiscotée, le cour gonflé par le même sentiment héroïque qui anime les personnages de ses bouquins. Alors que le réalisateur Phil Coyote tourne une série Z, un de ses acteurs se fait assassiner. Arthur, soupçonné d’être mêlé au meurtre, va combattre, se débattre, pour prouver son innocence et dénicher le coupable. Le scénario un poil confus de Pécherot se débat entre le milieu du cinéma bas de gamme, les triades chinoises et le soupçon d’une invasion extra-terrestre. Notre héros, dont la cervelle, si elle est surchauffée, ne marche toutefois pas au mieux de ses capacités, se débat en pleine confusion, engendre les catastrophes pour finalement retomber sur ses pattes. Comme un chat balancé du quatrième étage. Pourquié, après avoir mis en image une histoire du Poulpe, persiste dans les enquêtes tordues, celles qui en envoient plein la poire au personnage principal. Avec son dessin énervé et vivant, il nous propose aujourd’hui un marathon que l’on parcourt sans jamais reprendre son souffle. Et pour ajouter àla déroute de cette aventure dont on n’aimerait pas être le héros, les auteurs ont développé trois fins différentes.

© Olivier Ka l’Humanité